De la Probabilité.
Qu'est-ce qu'une probabilité ?
De fait, l'on pourrait commencer par en donner une définition étymologique, et alors on dénicherait la racine probo "faire l'essai", "éprouver", "approuver", ou bien encore "faire l'essai". Alors probabilis nous donnerait "vraisemblable" ou "digne d'approbation".
Avant même d'étudier les modèles mathématiques et physiques
(mécanique, quantique en particulier) de la probabilité, définissons
ses caractères intrinsèques. Est-elle objective ou bien seulement
subjective ? A petite échelle, elle apparaît subjective, puisque sa
réalisation n'est pas certaine, et de fait elle dépend d'un certain
nombre de facteurs. A plus grande échelle, lorsque l'évènement se
répète un nombre infini de fois, on retrouve les prédictions apportées
par la probabilité, et c'est là une vision objective. On a donc
ambivalence : subjective et objective, mais sous ce paradoxe apparent
se trouve un problème d'échelle latitant, et sous la subjectivité se musse
l'objectivité qui manque d'assurance, qui peine à se développer :
l'expérience n'est réduite qu'à quelques évènements.
Pour Laplace, l'utilisation des probabilités n'est qu'une façon de
pallier au mieux notre ignorance des conditions initiales, dans un
monde régi par des lois déterministes.
La probabilité fait grand usage en mécanique, statistique et
plus particulièrement quantique, où on doit se baser tout naturellement
sur des modèles mathématiques. Renie-t-on là par la probabilité
empirique, simple statistique à tous égards, la rigueur et la
l'irréfragable logique mathématique ?
"Caractère de ce qu'on doit s'attendre, de ce à que l'on doit ajouter
foi, lorsque l'on ne peut affirmer avec certitude que cette chose se
produira ou est vraie ; enjeu d'un jugement subjectif sur le probable ;
la probabilité est susceptible de degrés et peut ainsi servir à des
comparaisons : certains évènemenet sont plus probables que d'autres. On
tâche donc de la mesurer, ce qui donne lieu aux définitions
mathématiques de la liberté." Voilà ce qu'on peut lire dans le Dictionnaire des concepts philosophiques de Michel Blay. La probabilité serait-elle donc simple mesure statistique ? ...
Que peut-on espérer d'une probabilité ?
A priori, on peut espérer qu'elle dise vrai - ou
pas. Mais au-delà, elle nous plonge, paradoxalement à sa nature, dans
une peur de la part de non-réalisation, quand l'évènement n'est pas une certitus, et agit comme un oligodynamique. Je m'explique ici : sachant
que tel évènement va se réaliser avec telle probabilité, il est
inhérent à la majeure partie des Hommes de craindre la réalisation
contraire, et non de se réjouire d'une probable réalisation de
l'évènement souhaité. La probabilité nous plonge dans la crainte.
Cependant, l'homme de vertu, qui est empli de courage, se réfugiera
dans l'espoir que lui offre la probabilité non-nulle de l'évènement
qu'il souhaite se voir réaliser. Il était question, plus haut, de la
liberté. Mais la probabilité ne nous plonge-t-elle pas dans une
aliénante crainte ou un aliénant espoir ? Elle est enfermement sur ce
qui paraît probable, et non pas inévitable. Elle est altération du liberium arbitrium, elle force la décision de l'homme qui entrevoit son futur. Elle nous permet
d'envisager le futur, et c'est cela, ce me semble, qui fait peur à
l'Homme.
Aussi, la notion de probabilité indique une objectivité, comme on en a
parlé, et donc l'évènement considéré apparaît avec une probabilité
irréfragable, contre laquelle l'Homme ne peut rien faire : ainsi donc
la fatalité l'emporte encore avec elle, le privant aussi de liberté.
Cependant, il essaye de lutter contre, et épuise peu à peu ses forces
contre l'Inexorable. La probabilité se montre comme un dictum.
Que nous amène alors de positif la Probabilité ? Une simple satisfaction de la curiosité ?
Pernicieux amor fati.